23.10.14

Mathias
Kiss
Artiste

PAR MARGAUX BARTHELEMY

Après de nombreuses années d’extrême rigueur et de discipline intense au sein des Compagnons du Devoir, Mathias Kiss s’est libéré des codes de l’architecture traditionnelle et haussmannienne dictés par ses pères, pour renaître alors comme un artiste à part entière. Il signe aujourd’hui lui-même ses oeuvres à travers une approche radicalement différente de l’habitat. On ne fait plus appel à lui pour de la restauration désormais, mais pour réaliser notamment des oeuvres in situ chez des particuliers et des collectionneurs qui convoquent l’artiste afin que leurs antres deviennent oeuvres. Il ne s’agit pas ici de design mais d’installation. Mathias Kiss ne travaille ni dans l’ornement ni dans la décoration, quand des collectionneurs invitent l’artiste chez eux, M. Kiss se sert de leurs espaces personnels comme matière première pour son travail. Quand il réalise un tapis par exemple, ni la couleur ni la matière n’ont d’importance, il vient extraire une forme qu’il dessine entre les fissures qui composent un parquet en pointe de Hongrie. Ses yeux ont été éduqués à travers la rigueur et la noblesse de l’architecture à la française, il ne peut pas s’empêcher de venir détourner ces codes qu’il connait par coeur, comme un véritable leitmotiv. Quand à l’épaisseur du velours ou la teinte du tapis, il laisse les décorateurs s’en charger. Son héritage est riche, ses références apprises lors de son compagnonnage appartiennent au passé, et il sait aujourd’hui, en tant qu’artiste, comment les détourner et les amener vers des oeuvres ancrées dans le présent. Lorsqu’il parle de la Kiss Room,  véritable sculpture monumentale et habitable qu’il tapisse entièrement de miroirs ; il explique que cette chambre expérimentale aurait très bien pu être réalisée au temps de Louis XIV, une sorte de galerie des glaces d’aujourd’hui, tant les techniques qu’il a utilisé sont comparables à celles du panneautage d’autrefois. Quand il réalise des ciels peints aujourd’hui ce n’est plus pour restaurer les plafonds du Louvre, mais pour matérialiser un besoin d’air obligatoire, qu’il installa par exemple à l’ancien siège du Parti Communiste dessiné par Oscar Niemeyer. Ces ciels ne recouvrent plus des plafonds haussmanniens mais des murs verticaux, des toiles. En se séparant définitivement du compagnonnage, Mathias Kiss a rejeté de manière quasi épidermique la présence de l’angle droit. Comme une crise d’adolescence plastique, il a intitulé sa première série en tant qu’artiste « Sans 90° », comme un pied de nez à son ancienne vie. Tout un symbole. Marqué au fer rouge par son expérience de compagnonnage, qu’il décida malgré tout d’arrêter soudainement à la trentaine, l’artiste puise constamment son inspiration dans son apprentissage. Lorsqu’il réalise « Golden Snake » issue de la série « 90° » cette fois, il réinvite la corniche. Originellement placée à la naissance de nos plafonds français, cette frise dorée qu’on trouve dans les appartements bourgeois parisiens a été malmenée par Mathias Kiss.  Un artiste qui détourne sans compter les codes de nos habitats.

After many years of extreme rigor and intense discipline within the Companions, Mathias Kiss released himself of the codes of traditional Haussmann architecture dictated by his fathers, to be reborn as a full-fledged artist.  He signs today his works himself, through a radically different approach to habitat.
He is now no longer called upon for restoration, but in order to create in situ works for individuals and collectors, who summoned him to transform their dens into artworks.
It is not design, but installation. Mathias Kiss does not work in ornament or decoration when collectors invite him inside their homes; M. Kiss uses their personal spaces as raw material for his work.
When he makes a carpet for example, neither the color nor the material are important; he extracts a shape, which he draws in between the cracks composing the Hungarian point parquet. His eyes were educated through the rigor and the nobility of the French architecture; he cannot refrain form diverting these codes that he knows by heart, like a leitmotif.
When it comes to the thickness of the velvet or the shade of the carpet, he lets designers handle it.
His legacy is rich, his references learnt during his Companionship belong to the past, and he knows now, as an artist, how to divert and to bring them towards works anchored in the present.
When he talks about the “Kiss Room”, a truly monumental and habitable sculpture, which he fully lined with mirrors; he explained that this experimental room could well have been created at the time of Louis XIV, a sort of contemporary Hall of Mirrors, as the techniques he used are comparable to those of old panelling.
When he today creates painted skies, it is no longer to restore the ceilings of the Louvre, but to materialize a mandatory need for air, which he for example installed in the former headquarters of the Communist Party designed by Oscar Niemeyer.
These skies no longer cover Haussmann ceilings, but vertical walls, canvases.
By permanently leaving Companionship, Mathias Kiss rejected, in an almost epidermal way, the presence of the right angle.
Like a plastic teenage crisis, he entitled his first series as an artist “Without 90°”, thumbing his nose to his old life. Highly symbolic.
Forever marked by his experience of Companionship, he nevertheless decided to suddenly quit at thirty; the artist constantly draws inspiration from his training. When he created “Golden Snake”, from the series “90°”, he this time reinvented the ledge.
Originally placed at the base of our French ceilings, this golden frieze found in bourgeois Parisian apartment was mistreated by Mathias Kiss.
An artist who diverts, without counting, the codes of our habitats.