S’est ouvert le 27 Septembre la 4ème édition de la Biennale de Rennes, qui se tiendra jusqu‘au 30 Novembre 2014. Baptisée « PLAYTIME » par sa jeune commissaire anglo-belge Zoë Gray, cette biennale est composée d’une part de trois expositions collectives majeures , d’autres part de six expositions personnelles dites « associées ». Orchestrée de manière décomplexée et rafraîchissante par cette curatrice, mélangeant son humour et surréalisme belge avec un certain sens du pragmatisme anglo-saxon, cette biennale nous fait du bien !
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Une Biennale étalée dans d’autres nombreux lieux rennais notamment 40mcube, La Criée ou encore le Cabinet du livre d’artiste ; dans laquelle Zoë Gray nous offre des repères en donnant la possibilité aux artistes qu’elle a choisi, de réaliser au moins deux oeuvres pour la Biennale. Résultat, la moitié des artistes présentés cette année ont réalisé au moins deux oeuvres. Nous retrouvons donc tout au long du parcours de la Biennale des noms qui sont alors déjà familier, ce qui rend cette manifestation artistique assez digeste et lisible à travers des artistes qui réussissent à faire le lien entre les trois lieux majeures de la Biennale. Un évènement souriant très bien orchestrée par cette jeune curatrice, dans laquelle elle a tâché de choisir des artistes dont les oeuvres ont une grande présence esthétique, à la fois séduisantes et ludiques,
accessibles et très parlantes. A découvrir jusqu’au 30 novembre 2014.
01
Les Ateliers de Rennes
« l’Aire de Jeu »
Installés dans la très récente Halle de la Courrouze, nouveau lieu inauguré pour la Biennale, les Ateliers de Rennes, fondés par le mécène Bruno Caron, donnent le top départ d’un parcours artistique ludique réunissant les deux mots d’ordre de cette biennale : l’Art et l’Entreprise.
Son titre « PlayTime » est emprunté au film de Jacques Tati (1967), et signifie littéralement « récréation » dans la langue natale de la commissaire Zoë Gray. A travers ce titre parlant, évoquant la cours de récréation, cette biennale traite particulièrement de la notion du travail, de sa valeur dans l’art, à travers le processus créatif, et la pratique artistique. Ces ateliers ont été transformés en véritable terrain de jeu.
L’exposition s’ouvre sur un parcours de mini golf surréaliste conçu par l’artiste François Curlet, intitulé « GOGOLF » où il invite 13 artistes/designers-camarades à créer un « trou » de mini golf. Notamment Pierre Huyghe, Frank Scurti, Ann Veronica Janssens, ou encore Michel François.
Cette oeuvre est à la fois un parc d’attraction et un jardin de sculptures. L’espace s’articule également à travers un lieu de projection vidéo très ludique et bien pensé, où on été sélectionnées 5 vidéos autour du jeu et de l’imaginaire avec la formidable vidéo de Pilvi Takala « Real Snow White » réalisée en 2009 pour la galerie Carlos Ishikawa , qui nous renvoie à une notion d’imaginaire formaté. Dans la partie gauche de cette sublime halle de la Courrouze, l’artiste Michael Beutler a imaginé un marché couvert, rappelant nos étalages de fruits et légumes, mais servant cette fois de support pour des céramiques inclassables du duo Dewar & Gicquel ou encore une sorte de collection d’objets-trouvés collectés par l’artiste Bruno Peinado et ses filles.
02
Musée des beaux-arts
de Rennes
« Le Droit à la Paresse »
Pour la première fois cette année , le Musée des Beaux Arts de Rennes situé au coeur de la ville, prête la totalité de ses espaces dédiés aux expositions temporaires à la Biennale.
Zoë Gray en profite pour nous interroger sur la place de l’oisiveté et de l’indolence dans notre société où le droit au travail est largement proclamé. Mais aussi sur la place qu’occupe l’art dans le monde du travail. L’art est-il perçu comme un travail ? Quelle place donner à la paresse dans notre société ?
En plaçant l’artiste comme un oisif qui opère le choix critique de refuser les notions standards du travail, cette exposition au Musée des Beaux Arts nous questionne sur le rôle capital de l’indolence sur la créativité et sur nos vies. Notamment à travers des oeuvres aux titres évocateurs comme celle de François Curlet intitulée « Architecture Fainéante » ou encore la série de dessin de l’artiste Thomas Tudoux « Sieste ».
On retiendra particulierement la délirante vidéo de Pilvi Takala « The Trainee » (la stagiaire), réalisée en 2008, dans laquelle l’artiste s’est filmée durant un mois en caméra cachée lors d’un stage chez Deloitte où elle joue au farniente et à l’inaction totale, déclenchant la stupéfaction de ses collègues au sein d’un leader mondial de l’audit !
03
Frac Bretagne
« Work as Play,
art as Thought »
Sublime monolithe noir conçu par Odile Decq, le Frac Bretagne accueille lui aussi cette joyeuse biennale. « Work as play art as thought » (le travail en tant que jeu, l’art en tant que pensée) est emprunté à une oeuvre conceptuelle des années 1970 de l’artiste français Robert Filliou, personnage cher à Zoë Gray qui aime le décrire comme « le fantôme bienveillant de cette biennale ».
Au sein de ce Frac, plusieurs oeuvres sont immanquables comme par exemple une installation gigantesque de Bruno Peinado, réalisée et produite pour la Biennale. Zoë Gray a laissé carte blanche à cet artiste qu’elle connait bien, sur le thème du PlayTime. Fin août, alors que l’ouverture de la Biennale approchait, la commissaire contactait l’artiste à propos de l’avancée de son oeuvre qu’elle n’avait toujours pas vue. Il lui répondra qu’il s’agit d’une sculpture « monumentale, baroque et théâtrale ». Le résultat est à la hauteur de ses mots : inspiré des jeux de Montessori, B.Peinado installe un jeu de construction géant aux couleurs acidulées et textures appétissantes en tous genres, entre psychédélisme et inspirations tout droit sorti du mouvement Memphis, l’installation est euphorisante.
Nous retiendrons l’installation de Michael Beutler « The Garden », qui amène nos regards sur l’espace de l’atelier, le processus de création, le lieu où l’artiste travaille, réunissant ainsi les deux notions essentielles de cette Biennale, l’art et l’entreprise. Dans la dernière salle d’exposition du Frac entre les nombreuses installations d’Oscar Murillo, d’Erik van Lieshout ou encore de Gareth Moore, citons l’oeuvre géniale de l’artiste argentin Gaspar Libendinsky intitulée « Mister Trapo », dans laquelle, à travers une certaine « culture du chiffons » très présente en Argentine, l’artiste s’est employé à créer une collection d’uniformes à partir d’une vaste palette de chiffons de coton, pour la vaisselle, serviettes de cuisine, ou autre serpillière nid d’abeille !